Une vallée profonde. Tellement encaissée que le soleil d’automne n’y pénètre plus au-delà de midi. Une vallée née d’un coup de sabre qui, au temps du chaos, aurait échappé aux dieux en guerre. La roche blanche des Corbières en resta fendue pour toujours.
Un clair torrent s’y écoule. Sautant de roc en roc. Polissant le calcaire grossier. Le creusant en gigantesques marmites qui accueillent des poissons curieux. Des humains assoiffés de douceur.
La musique de l’eau fraîche couvre le chant des oiseaux. Près des cascades, les rares brins d’herbe de ce pays aride recueillent des perles transparentes et s’en abreuvent jusqu’à ce que le soleil passe les crêtes pour s’insinuer jusqu’au fond de la brèche. À l’heure des dragons, quand la pierre surchauffe même dans les profondeurs, la vie se tait un moment. Elle sait bien qu’elle aura le dessus. Elle attend son heure.
Dès que l’astre de feu ne pourra plus plonger ses rayons dans la cassure, le vert reprendra de la vigueur et les fleurs s’ouvriront à nouveau.