Les Trésors d’Ismeralda
13,5 x 21,5, broché, 276 pages
Illustrations Auriane Laïly
Éditions L’ametlièr, 2012
ISBN 978-2-9535860-3-9
15 €
À lire sans modération de 10 à 110 ans
Aux Antilles françaises en cette année 1840, le monde est en train de changer. Le sucre se vend mal et l’abolition de l’esclavage fait débat.
Un des derniers pirates, Ladrillo, lors d’un raid sur une plantation du sud de la Martinique, touche à ce que Noah et sa sœur Isana ont de plus cher, leurs amis.
La poursuite du forban sanguinaire mène les deux jeunes gens jusqu’à Ismeralda, petite île du chapelet des Grenadines où les boucaniers ont leur repaire. Ce qu’ils vont découvrir pendant cette expédition risque bien de changer leur vie entière. Les vrais trésors ne reposent pas forcément dans le ventre des galions chargés d’or et d’émeraudes qui gisent au fond de la mer des Caraïbes.
Au bout de ce voyage, le sort leur réserve une étrange surprise. Et c’est le cœur palpitant qu’ils se jettent dans la nouvelle aventure qui s’ouvre à eux, vers l’inconnu des îles du nord.
Daniel Pagés est né en Haut-Languedoc.
Successivement éducateur de jeunes en difficultés, paysan et skipper professionnel de voiliers, il accompagne, plusieurs mois par an, des enfants dans la découverte de l’océan sur l’île d’Oléron.
Depuis une première traversée de l’Atlantique sur la route de Christophe Colomb en 1978, suivie de nombreux voyages, l’histoire et les couleurs des îles antillaises sont restées gravées au creux de ses rêves. Elles ressurgissent dans cette aventure pleine de lumière.
1
(Chapitre 1)
Le joli cotre se balançait au rythme de la vague qui passait par intermittence la barrière de corail. Le soleil se couchait déjà derrière les collines, allongeant l’ombre des grands cocotiers jusque dans l’eau transparente.
— Regarde, le charpentier a terminé son travail et s’installe pour la sieste !
Noah se remit à plat ventre d’un coup de reins et se frotta les yeux. L’étendue lumineuse était éblouissante. Il laissa ses pupilles encore aveuglées s’habituer.
— Il n’a pas l’air de s’inquiéter pour ses compères.
Il glissa vers sa sœur dans l’ombre fraîche du raisinier sans cesser de surveiller le navire.
— On attend qu’il s’endorme et on y va, souffla le garçon.
— Non, c’est moi qui irai toute seule. Tu ne t’approcheras que quand je te ferai signe. Il se méfiera moins, s’il m’aperçoit. Une fille, ça ne peut qu’être inoffensif…
Noah se préparait à protester, mais les yeux verts d'Isana se fixèrent sur lui. Il y lut immédiatement sa détermination et n’insista pas.
— Inoffensive ? S’il te connaissait…
Il ricana et évita de peu le coup de coude qui visait ses côtes.
Sur le pont, l’homme avait rangé ses outils et s’était allongé sur les voiles affalées à l’avant. Il avait tiré son chapeau sur ses yeux et grattait sa barbe grise. Il avait bien l’intention de profiter des derniers instants de calme.
Un peu de repos avant que ses camarades ne rentrent de leur expédition.
Dès qu’ils seraient à bord, pas question de traînasser. Le capitaine Tob était plus généreux avec ses coups de pied qu’avec les pièces d’or qu’il conservait dans sa bourse.
Il faudrait relever l’ancre sans perdre une seconde et changer d’air au plus vite !
2
(Chapitre 10)
La troupe des pirates faisait grand bruit sur la plage éclairée par le feu. Un des hommes retirait de la braise pour en remplir une fosse toute proche. Le cochon entier y rôtissait, empalé sur une broche.
Le charpentier appuya soudain sur la tête de Noah et le plaqua au sol.
— Chut ! il y en a deux qui viennent par ici !
— Ils ramassent seulement le bois sur le rivage dans la clarté de la lune. Trop peur du noir et du diable qui rôde pour s’aventurer plus loin, souffla Isana.
Les forbans passèrent à quelques pas de leur poste d’observation et ne tardèrent pas à revenir alimenter le feu d’une brassée de branchages. Un long tourbillon d’étincelles s’éleva vers le ciel et les rires reprirent de plus belle autour des flammes qui illuminèrent brusquement tout le secteur.
— J’en compte onze ! murmura le garçon.
Isana confirma.
— Ils étaient vingt en tout avant l’attaque. Cinq à bord pour emmener le Gavilán jusqu’au ponton, dit le vieil homme, et quinze pour donner l'assaut à la plantation, Ladrillo avait décidé comme ça.
— Moins sept, il doit en rester treize… Ils en ont certainement laissé deux sur le bateau.
— Non, regarde, il y en a un qui arrive !
Émergeant de la pénombre, le canot venait de s’échouer sur le sable et une haute silhouette barbue en débarquait et pénétrait dans le cercle de lumière.
— C’est Ladrillo ! Doit en avoir posté un de garde à bord…
— Dommage que je n’aie pas mon fusil, regretta Isana.
Son frère appuya sur son épaule et la fille s’aplatit à nouveau.
— Il y en aurait encore douze ! Non, on va faire plus discrètement. Je nage jusqu’au navire, voir comment ça se présente. Après, on avisera ! On a plusieurs heures, la viande n’est pas cuite et ils n’ont pas assez bu. Quand ils dormiront, on pourra peut-être même emprunter leur canot pour débarquer tous leurs passagers.
— Tu veux aussi libérer les esclaves ? Ça va nous compliquer la tâche.
C’est Isana qui répondit au charpentier étonné.
— On ramène tout le monde à la maison, Jos, tout le monde…
Elle sentit sur son épaule la main de son frère qui se resserrait. Une pression légère et affectueuse.
Il approuvait et la remerciait.
[...